Nous venons de célébrer la fête du Christ Roi de l’univers et Lui, l’Innocent crucifié, il continue à attirer tous les hommes à Lui, mais les hommes vont-ils accepter la source de l’Amour, la source de toute Miséricorde ? Et voilà que déjà, l’Église nous invite à tourner nos regards vers Celui qui vient, mais sommes-nous prêts à l’accueillir ? Tout l’enjeu de ce temps de l’Avent est là : quatre semaines pour ouvrir nos cœurs et l’inviter à venir naître en nous, là où nous ne l’avons pas encore accueilli.
En même temps, nous sommes en pleine pandémie, le Covid 19 continue ses ravages, et nous ne cessons de tâtonner sans savoir comment vraiment lutter contre lui. Personne ne sait plus quoi penser, pour les hôtels, les restaurants, les bars, pour tous les acteurs du monde de la culture, il s’agit d’une catastrophe dont certains ne se relèveront pas. Beaucoup de commerçants ne savent pas s’ils vont arriver à payer toutes leurs échéances et déjà le nombre de chômeurs est reparti à la hausse, à une hausse massive. Les plus pauvres sont et seront les premières victimes de cette crise inédite.
Le président de la République nous a donné une feuille de route, et déjà, nous nous demandons ce que veut dire une jauge de trente personnes pour célébrer le culte dans nos églises ; imaginer trente personnes disséminées dans Saint-Sulpice à Paris ou à Saint-Siffrein à Carpentras ou encore trente personnes perdues dans la basilique Saint-Pie X à Lourdes, nous sommes en plein délire. Mais heureusement, ce n’était qu’un couac et déjà il paraît que la jauge sera réévaluée …
Devant tout cela, si nous voulons nous préparer à accueillir Celui qui vient, nous pourrions regarder et l’importance de l’eucharistie et l’importance des fruits de l’eucharistie. À chaque messe, j’entends saint Ambroise nous dire : “Chrétiens devenez Celui que vous recevez !” et saint Jean Chrysostome nous rappeler que je ne peux communier au corps du Christ sans communier avec tous ceux qui sont les membres du corps du Christ, car l’autre est le Christ ! L’eucharistie est vraiment la source et le sommet de toute vie chrétienne et saint Jean qui ne rapporte pas le récit de la cène, nous rapporte les deux grands fruits de l’eucharistie, la loi du service à travers le récit du lavement des pieds et le commandement de l’Amour, “comme je vous ai aimé !”
Oui, notre vie doit s’enraciner dans le mystère de l’eucharistie et de la présence réelle du Christ : et reçu dans la célébration du sacrifice eucharistique, et contemplé à travers l’adoration eucharistique. Alors, nous pourrons vivre du premier fruit de l’eucharistie en nous mettant au service de nos frères, qui nous entourent et qui sont dans le besoin d’une manière ou d’une autre - ayons l’inventivité de la charité. Puis, comme rayonnement de l’eucharistie, vivons du commandement de l’Amour : “Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés.”
Très vite cependant, je découvrirai combien je suis incapable d’aimer vraiment, mais je le sais : Dieu nous a donné son Esprit Saint pour venir au secours de toutes nos faiblesses et nous rendre capables d’aimer divinement sous sa conduite.
Enfin, pendant ce temps de l’Avent, il ne nous est demandé qu’une chose : ouvrir notre cœur, briser la carapace qui bien souvent nous empêche d’accueillir Celui qui vient et le laisser venir naître en nous dans la nuit de Noël.
La crèche la plus réaliste que j’aie jamais vue est celle de lycéens à Carpentras il y a des années : un sac poubelle de deux cents litres, rempli d’ordures et à l’entrée du sac, un petit Enfant Jésus emmailloté et autour de lui les photos de tous les lycéens et du prêtre qui les accompagnait alors.
Oui, préparez vos cœurs à l’accueillir, pour lui permettre de naître en vous, là où vous ne l’avez pas encore accueilli, et découvrez-le présent dans vos frères en servant et en aimant comme Lui.
+ Jean-Pierre Cattenoz,
Archevêque d’Avignon