Dans notre région, le temps de l’Avent s’ouvre avec la fabrication de la crèche. Du moins la crèche fait-elle partie des rituels d’entrée en Avent, temps précieux de préparation à la venue de Jésus. Souvent elle devient pour quelques semaines le nouveau cadre de nos prières, et nous prenons plaisir à allumer une bougie devant la Sainte Famille.
La construction patiente de la crèche est en elle-même une préparation à la venue de Jésus : elle peut devenir exercice de relecture de soi-même, dans chacune de nos dimensions et des liens qui nous unissent à Dieu, à sa Création, à tout être qui l’habite. Elle est une illustration en relief de la Cité de Dieu que nous souhaitons construire.
Une conversion par étapes, ... où tout est lié
Il y a d’abord le socle et les fondations, sur lesquels reposera la crèche. Ils nous interrogent sur nos propres fondements, sur la base que nous voulons donner à notre vie de chrétien, sur la manière dont nous voulons œuvrer au développement de la société que nous habitons. Sur quoi ai-je bâti ma vie ? Pour m’élever dans quelle direction ? Benoît XVI dans Caritas in veritate place la charité comme moteur et inspiration nécessaire à l’être humain pour que « [son] action contribue à l’édification de [la] Cité de Dieu universelle ». Il cite encore Paul VI en nous disant que « toute l’Eglise, dans tout son être et tout son agir, tend à promouvoir le développement intégral de l’homme quand elle annonce, célèbre et œuvre dans la charité ». 1
Viennent ensuite les matériaux choisis pour dessiner le paysage. Dans la diversité, du lichen à la branche de chêne qui le porte, du caillou calcaire à la mousse moelleuse, se lit ici la beauté de la Création confiée à l’être humain par Dieu. Son usage représente pour nous une responsabilité à l’égard des pauvres, des générations à venir et de l’humanité toute entière 2. Comme pour cette petite crèche, que nous préparons avec attention pour accueillir un enfant et tout un Royaume, soyons soucieux de préserver la biodiversité et notre environnement, pour continuer à y accueillir dignement la communauté humaine et à y célébrer les œuvres de Dieu.
Puis nous disposons les santons. Il y a là abondance de costumes (l’arlésienne et la vendeuse de fleurs, le grand-père et le cavalier), de conditions (l’aveugle guidé par l’enfant, le notable et le boumian) et de talents (le rémouleur, le boulanger, le bucheron), que nous faisons se côtoyer à l’envi. Chacun à son travail, comme pour souligner que « la dignité de la personne et les exigences de la justice demandent (…) que l’on continue à se donner comme objectif prioritaire l’accès au travail ou son maintien, pour tous »3. Chacun porteur de son identité, car « l’unité de la famille humaine n’abolit pas en elle les personnes, les peuples et les cultures (…) mais elle les rend plus unis dans leur légitime diversité »4. Ayons à cœur de « former avec les autres êtres de l’univers une belle communion universelle »5.
Enfin, plaçons la Sainte Famille au centre de notre quotidien. Tournons-nous vers Jésus par Marie, Reine de toute la Création. La figure de Saint Joseph, protecteur de l’Eglise universelle, peut « nous enseigner à protéger, peut nous motiver à travailler avec générosité et tendresse pour prendre soin de ce monde que Dieu nous a confié »6.
Je vois dans cette crèche toutes les dimensions du chemin que nous sommes invités à parcourir pour nous convertir, afin que notre joie au matin de Noël soit éclairée de Charité.
Marie-Anne MOLLE
1 Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate, Introduction, 7
2 Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate, Chapitre 4, 48
3 Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate, Chapitre 2, 32
4 Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate, Chapitre 5, 53
5 Pape François, Lett. enc. Laudato Sì, Chapitre 6, III, 220
6 Pape François, Lett. enc. Laudato Sì, Chapitre 6, VIII, 242