Edito de l’évêque> « Pour que nous soyons saints et immaculés en sa présence, dans l’amour »
Le mois de mai s’offre à nous, entièrement inclus dans le Temps pascal, ce temps qui laisse se déployer la joyeuse annonce de la Résurrection, et vient soutenir en nous l’accueil de l’Esprit-Saint.
Une traversée rapide de l’agenda donne de mesurer les nombreux rendez-vous ecclésiaux auxquels nous serons amenés à participer les uns ou les autres.
Journée diocésaine des familles à Saint-Gens le 1er mai, et en ce même lieu, fête de la Saint Gens les 21 et 22 mai.
Séminaire des Chefs d’Établissement de l’Enseignement catholique à la découverte de la pédagogie de Saint Jean Bosco, à Turin.
Synthèse de la réflexion proposée par les équipes synodales, et restitution de cette synthèse le 28 mai
Confirmations au sein des paroisses…
Au milieu de ce mois, nous serons un certain nombre à nous rendre à Rome pour représenter le diocèse à la célébration de canonisations qui se vivra le dimanche 15 mai.
Dix nouveaux saints seront ainsi proclamés, dont trois français qui peuvent nous être proches pour plusieurs raisons : Charles de Foucauld, César de Bus et Marie Rivier.
Je voudrais m’arrêter en quelques lignes sur chacun d’entre eux, moins pour les découvrir que pour nous laisser rejoindre, interpeller et entraîner par eux.
Charles de Foucauld (1858-1916) est d’évidence le plus connu par son aventure humaine et spirituelle, son apostolat de la prière, du silence et de l’amitié, son message de fraternité universelle.
Marie Rivier (1868-1838), née en Ardèche, attentive à la situation des enfants et des jeunes, persuadée que l’école est le meilleur moyen de leur transmettre la bonne nouvelle de l’Évangile, soucieuse de l’initiation religieuse des petits enfants. Elle est la fondatrice des sœurs de la Présentation de Marie. Celles-ci exercent la tutelle de deux établissements de notre diocèse.
César de Bus (1544-1607). Son nom et son témoignage sont trop mal connus. Natif de Cavaillon, et prêtre de ce diocèse, il porte le souci d’annoncer l’Évangile dans un langage simple, immédiat et familier, en étant particulièrement attentif aux petits et aux pauvres. Il fonde la congrégation des Pères de la Doctrine chrétienne.
On peut joindre à cet événement la béatification de Pauline Jaricot (1799-1862), fondatrice de l’Œuvre de la Propagation de la foi, qui sera célébrée le 22 mai à Lyon.
Nous pouvons donc être particulièrement fiers et heureux de ces figures de sainteté que l’Église reconnaît et nous indique pour vivre notre foi dans le temps qui est le nôtre, et nous réjouir pour notre diocèse de celle de César de Bus.
Bien des points ont été ou seront soulignés de l’actualité de chacun d’entre eux.
J’en relève simplement quelques-uns :
• L’enracinement dans l’écoute de la Parole de Dieu et la contemplation.
• La capacité à aimer et comprendre la culture dans laquelle nous vivons.
• L’attention aux enfants et aux jeunes et la proximité à avoir avec eux pour les accompagner dans une maturation humaine et un éveil spirituel.
• La préoccupation d’annoncer l’Évangile à frais nouveaux pour témoigner d’une Bonne Nouvelle dans le langage d’aujourd’hui et avec les mots de notre temps.
• Une vraie liberté pour témoigner de l’amour de Dieu dans le respect des personnes et de leurs histoires.
Voilà de belles figures qui nous précèdent et nous demeurent proches. N’hésitons pas à prendre le temps de les découvrir, de mieux les connaître, de marcher quelque peu avec elles . Elles nous redisent que le Seigneur ne cesse de nous chercher, de venir à notre rencontre ; que cette rencontre peut parfois être déterminante dans les retournements produits, et qu’elle peut ouvrir des chemins nouveaux pour nos vies et nos relations aux autres.
Le Pape François nous a redit que l’Esprit Saint répand la sainteté partout, dans le saint peuple fidèle de Dieu. Et la sainteté au fond, c’est le fruit de l’Esprit dans ta vie (Cf Ga 5,22-23).
En ce temps Pascal où nous nous réjouissons de la vie plus forte que la mort, laissons-nous éclairer par ces témoins qui soutiennent notre aujourd’hui. Qu’ils nous donnent de laisser creuser en nous l’espace où l’Esprit saura nous rendre dociles à l’œuvre de Dieu en nous et autour de nous. C’est aussi ce que viendra soutenir le discernement synodal.
+ François Fonlupt
Paroisses en créations > Quels fruits pour quels engagements ?
Ce printemps encore et pour une dernière session, la Conférence des Evêques de France a invité des laïcs, engagés en paroisse sur la question de l’écologie intégrale, à accompagner leur évêque sur la journée et demie dédiée à ce sujet. Cette 5e session clôt le cycle sur l’écologie intégrale qui a débuté en 2019 par une introduction en forme d’état des lieux. Puis à Lourdes ou en visio-conférence pour cause de Covid, ont été abordés les thèmes de la consommation et de la production, depuis l’agriculture jusqu’aux déchets, et de la fraternité en novembre dernier. Pour le grand final, nos évêques accueillaient des représentants chrétiens protestants et orthodoxes : les orthodoxes ont 40 ans d’avance sur nous sur la transition écologique, tandis que les protestants se sont aussi emparés du sujet notamment avec la création et le lancement du label Eglise Verte.
Si les thèmes abordés sont forcément pour une part techniques et scientifiques (l’écologie est la science ayant pour objet les relations des êtres vivants à leur environnement ainsi qu’avec les autres êtres vivants), l’apport théologique n’a pas été oublié et la question de la fraternité irradiait les questionnements et projets.
Les laïcs présents ont pu échanger entre eux et présenter les actions initiées dans les diocèses de France. Une partie de la session a été consacrée à la relecture / élaboration de pistes d’actions concrètes et d’engagements pour les diocèses. L’attente était forte de la part des participants laïcs : que pouvons-nous faire pour agir ?
Nous, à qui Dieu a confié sa Création, sa Création pour qu’elle loue le nom du Seigneur, le seul au-dessus de tout nom :
(…) Louez-le, tous les univers.
Louez-le, soleil et lune, louez-le tous les astres de lumière ;
vous, cieux des cieux, louez-le,
et les eaux des hauteurs des cieux.
Qu’ils louent le nom du Seigneur :
sur son ordre ils furent créés ;
c’est lui qui les posa pour toujours
sous une loi qui ne passera pas.
Louez le Seigneur depuis la terre (…)
les montagnes et toutes les collines,
les arbres des vergers, tous les cèdres ;
les bêtes sauvages et tous les troupeaux,
le reptile et l’oiseau qui vole ; (...)
Avec un nombre de vertébrés sauvages divisé par deux entre 1970 et 2012 dans le monde, et une perte d’environ 80% des insectes volants en Europe sur la même période 1, elles ne sont plus si nombreuses les créatures qui furent créées par Dieu pour louer son nom. Et cette 6e extinction de masse des espèces remporte la palme : « la grande crise du Permien (-90% de biodiversité) a duré 200 000 ans, avec un épisode paroxystique de 20 000 ans. Notre époque réalise les mêmes « scores » en 100 ans. Il fallut 30 millions d’années pour reconstituer une biodiversité équivalente. » 1
Qu’est-ce qu’on attend ?
Les équipes de laïcs engagés sur cette question dans les diocèses de France parlent de projets qui essaiment, mais relèvent aussi la faiblesse de l’engagement de l’Eglise, et le (trop) peu d’exemplarité qu’elle porte. Ce sujet, au lieu d’être traité comme un nouvel effort, comme une autre activité colorée d’un brin de théologie, ce sujet devrait au contraire teinter toutes nos actions, reformuler tous nos projets, éclairer tous nos engagements, dans notre relation à Dieu, à nos contemporains connus et inconnus, à notre famille, à ceux qui arriveront après nous et nous reprocheront notre tiédeur.
Je crois que la sobriété recherchée dans la Foi, l’Espérance et la Charité est une sobriété porteuse de beaucoup de fruits, un témoignage chrétien d’une grande force agissante.
« Au fond, le plus utopique n’est pas de souhaiter vivre de manière plus simple, mais de croire qu’on pourra continuer impunément à vivre au-dessus de nos moyens »2.
Formulé autrement par le Pape Paul VI en 1967 dans Populorum Progressio :
« Nul n’est fondé à réserver à son usage exclusif ce qui passe son besoin quand les autres manquent du nécessaire ».
Et même si la recherche de la sobriété passe par des investissements plus importants que prévu à l’instant T, il n’est plus temps de reporter et d’économiser nos biens dans des greniers à blé : cette nuit même, Dieu pourrait nous redemander notre vie, et nous aurions conservé « au cas où », « puisqu’on peut faire moins cher », au lieu d’être riche en vue de Dieu, en servant nos frères, la Création et son nom, le seul qui est au-dessus de tout nom.
Label église verte
Encore du vert, cela manque d’originalité... Le label église verte, malgré un nom peu emballant, est un bon outil créé pour accompagner les paroisses dans leur recherche de sobriété et de conversion à l’écologie intégrale. Il a le mérite de proposer des pistes d’actions sur tous les aspects de la vie de la paroisse : matériel bien sûr, mais aussi solidaire et liturgique. Le diagnostic permet de se situer par rapport aux efforts à accomplir, et parfois de réaliser… que nous sommes déjà en chemin !
Marie-Anne Molle
1 Cités dans La vie oubliée, crise d’extinction : agir avant que tout ne s’effondre, de M. et J. Herrmann
2 Gaultier Bès, membre de la rédaction de la revue Limite
Portrait> Didier et le Pélé VTT : une histoire de foi !
En voulant aider les jeunes à réparer leur vélo sur les routes vauclusiennes du pélé VTT, Didier a redécouvert la foi.
De son enfance heureuse à Avignon, ce retraité de l’armée se souvient d’écoles, même s’il n’y excellait pas : Saint-Ruf, Saint-Jean-Baptiste-de-la-Salle, puis dès la sixième, c’est le petit séminaire, rue d’Annanelle. Là, il découvre la foi, mais aussi un but à atteindre dans la vie. Mais comme les études ne sont pas son fort, Didier s’engage dans l’armée, et il y restera 15 ans. Là, il y retrouve des valeurs, de la solidarité, et découvre la vie réelle, avec des missions compliquées. Ce n’est plus le séminaire, et Didier commence à perdre la foi.
Dans sa vie familiale, un premier mariage en 1982 se soldera par un divorce en 1988.
En 1989, Didier rencontre Patricia : « et depuis 33 ans, c’est le bonheur ! ».
Quant à aider les autres, Didier en a fait sa devise !
« Rendre service est une satisfaction pour soi-même et pour les gens à qui on rend service ».
Depuis qu’il est à la retraite, Didier fait partie du club de vélo Jonquerettes Evasion. Un jour, une personne du diocèse engagée dans le pélé VTT, contacte les clubs de vélo du Vaucluse à la recherche d’une personne pour réparer les vélos.
Le responsable du club en parle à Didier qui accepte, ravi d’aider des jeunes. Cependant, après ce oui du cœur, Didier aura quelques réticences concernant son implication dans ce rassemblement d’Eglise, de foi, alors qu’il n’avait plus la foi depuis 45 ans. On le rassure, et le voilà sur le pré-camp, regardant un peu de loin au départ, puis prenant conscience qu’il faisait partie de la communauté du pélé VTT, et finalement désirant s’intégrer. « Petit à petit, à force de parler avec le père Césareo et père Benoît Tartanson, il y a quelque chose qui est revenu ; je ne sais pas trop l’expliquer.
Et au cours du pèlerinage, tout s’est approfondi ; j’ai eu l’occasion de pouvoir me re- confesser, re-prendre l’Eucharistie, re-connaître l’Eglise ! »
Et comme tout se passe bien désormais, il suit les réunions du matin, les messes, les prières ! « Voir la joie des enfants, les jeunes qui déplacent les camps tous les jours, tout le travail qui est fait pour permettre aux jeunes à vélo d’avoir, le soir, à manger, de quoi dormir et faire leur toilette, c’est vraiment extraordinaire !
Et en rentrant à la maison, Patricia m’a dit : « Tu as changé ! » - Effectivement, il se sent rempli de paix et de sérénité.
Apprenant qu’il peut se marier à l’Eglise, car il est veuf de sa première épouse, Didier va voir le père Benoît Tartanson pour commencer une préparation au mariage avec Patricia, ravie de ce projet qui se concrétisera en plus le jour de ses 50 ans !
Et quand ses amis du club de vélo disent à Didier, de manière ironique, qu’il s’est fait « embarquer », Didier dit « Non, j’ai trouvé la sagesse ! » « Et désormais, mes mois de juillet sont bloqués pour le Pélé VTT ! »
Le livre du mois> Le Dieu de Dostoïevski, de Marguerite Souchon
Avec cet ouvrage, Marguerite Souchon réussit le tour de force de s’adresser aussi bien aux novices qu’aux lecteurs les plus chevronnés du romancier, leur proposant de creuser les grands thèmes centraux de son œuvre ainsi que ses préoccupations métaphysiques : la question de Dieu, bien sûr, mais aussi le mystère de l’âme humaine, théâtre d’un combat entre Dieu et le diable, ainsi que les tragiques questions de la souffrance et de la liberté.
Cette fine analyse se base sur les événements marquants de la vie de Dostoïevski, mais surtout sur son œuvre ; dont on retrouve des passages mythiques ainsi que les fameuses citations ; telles que :
« la beauté sauvera le monde » ou « si Dieu n’existe pas tout est permis »,
qui, trop souvent citées à tort et à travers, sont ici précisées et expliquées.
Il s’agit en effet de remettre les choses dans leur contexte : le siècle de Dostoïevski est celui de la remise en question du régime, la monarchie de droit divin et sa foi attenante.
Or, après des premiers romans à la fibre sociale très marquée (on y retrouve des accents Balzaciens), Dostoïevski constate que le socialisme de sa jeunesse s’est définitivement coupé de Dieu.
L’athéisme - outre son irrationalité - devient alors à ses yeux la plus grande des menaces civilisationnelles
En effet, si - selon les véritables citations - « Sans immortalité de l’âme, rien n’est immoral et donc tout est permis » et « Si Dieu n’existe pas, je suis Dieu », l’homme est la seule mesure de tout, c’est bien alors le règne du relativisme, et donc de l’arbitraire menant à l’anarchie.
Par ailleurs, le fait que l’homme soit un être fini et frustré de l’être, implique qu’il soit destiné à un infini ;
cette intuition de transcendance est la preuve qu’en l’homme existe une parcelle de divin.
Et pour retourner à Dieu, il a besoin du Dieu - lui même humain -, c’est-à-dire du Christ, modèle parfait, beauté incarnée qui représente ainsi l’aboutissement parfait de l’homme en Dieu.
C’est ainsi que la beauté, perçue comme signe du bien et du vrai, sauve le monde.
Dostoïevski explore ainsi les voies qui s’offrent à l’homme confronté à sa tragique dualité pour gérer le terrible fardeau de sa liberté : soit sombrer dans un matérialisme sans issue, soit s’improviser Dieu pour échapper à sa condition, au risque de se perdre ;
soit, enfin, choisir par amour la voix de rédemption offerte par le Christ.
Marguerite Souchon livre ici un ouvrage dense, mais rendu accessible par une grande qualité pédagogique et une attachante familiarité avec le lecteur qu’elle interpelle d’un humour espiègle pour s’assurer qu’il suit toujours bien !
Un ouvrage qui se présente donc comme une véritable porte d’entrée pour découvrir tant Dostoïevski que son œuvre, ou bien qui donne simplement envie de se replonger dans ses si célèbres romans.
Enseignement catholique > Une rencontre
Lorsque l’on m’a confié la mission de Direction du Collège Notre-Dame du Bon Accueil, ce fut une grâce.
Je ne pouvais espérer plus beau nom - encore fallait-il que j’en sois digne !
Ma première rencontre avec Marie s’est produite lors de ma venue dans l’établissement. J’ai poussé un vieux portail rouillé, et suis arrivée, un soir de juin, dans un jardin un peu suranné. Au milieu des lilas, des pissenlits, des fleurs de magnolias, se trouvait la statue de la vierge. Elle était là, dans sa discrétion, sa simplicité. Les bras ouverts, elle m’accueillait.
Je l’ai regardée timidement et l’ai prié, dans sa grande bonté, de m’aider, de m’éclairer dans cette nouvelle mission que j’allais découvrir
Confiante, j’ai franchi un second portail, et immédiatement je fus propulsée dans un tout autre univers !
Deux personnes m’attendaient, visages fermés, un énorme trousseau de clés à la main. « Voilà, c’est pour vous, votre bureau est à l’étage, mais il est fermé et nous n’avons pas la clé ! »
Le sourire de Marie m’est apparu, je bredouillai de vagues remerciements et pris les clés. Quel poids !
C’est à ce moment-là, que je compris combien Marie allait s’inscrire durablement dans ma vie.
Tout au long de ma mission, nous avons partagé des moments d’intimité. C’est elle qui a guidé mon chemin en me prenant sous son aile protectrice.
Son intégrité a inspiré ma ligne de conduite ;
Son humanité a facilité mes rencontres, l’écoute des autres ;
Sa sensibilité a orienté mes décisions ;
Sa sagesse a apaisé mes colères, bien qu’ils y aient de saintes colères !
Sa générosité a permis à la communauté éducative de construire de beaux projets au service des élèves, mais aussi des plus démunis. Elle a contribué à ce que la bienveillance préside aux échanges ;
Sa modestie l’empêchera de vous le confier, mais Marie, notre maman à tous, répond toujours présent ; elle ne se lasse jamais !
A l’aube de ma retraite, je sais que je peux franchir à nouveau le portail sereinement, en toute confiance, car Marie sera également là pour le nouveau chef d’établissement. Elle saura lui offrir sa protection.
Ma mission s’arrête, mais Marie continuera à m’en offrir de nouvelles, et Notre-Dame du Bon Accueil continuera à porter dignement son nom.
Danièle Barazzoni Chef d’établissement au collège Notre-Dame du Bon Accueil (Monteux)
Il y a 100 ans dans le diocèse> Autrefois dans le diocèse d’Avignon : 1872-1972
En devançant un peu le calendrier, afin d’honorer la Vierge Marie en ce mois de mai, évoquons le souvenir du premier pèlerinage diocésain d’Avignon à Lourdes. Travaillant à la sauvegarde des archives du Service diocésain des pèlerinages, Marie-Solange Duranton me faisait remarquer que nous fêtions cette année les 150 ans de ce pèlerinage ; puisse cette évocation encourager chacun à prendre part, cette année, au pèlerinage de Lourdes !
Les apparitions de Lourdes
Le 8 décembre 1854, au terme d’un long processus de foi, dans l’histoire de toute la chrétienté, la bienheureux pape Pie IX proclamait solennellement le dogme de l’Immaculée Conception, fixant officiellement sa fête au 8 décembre. Quelques années plus tard, du 11 février au 16 juillet 1858, la Vierge Marie, se présentant comme étant l’Immaculée Conception, apparaît à 18 reprises à sainte Bernadette à la grotte de Massabielle, au bord du Gave. Après bien des péripéties et oppositions, en janvier 1862, en déclarant un premier miracle, l’évêque de Lourdes reconnaît aussi l’authenticité des apparitions : « nous jugeons que l’Immaculée Marie, mère de Dieu, a réellement apparu à Bernadette Soubirous, le 11 février 1858 et jours suivants, au nombre de dix-huit fois, dans la grotte de Massabielle, près la ville de Lourdes ; que cette apparition revêt tous les caractères de la vérité et que les fidèles sont fondés à la croire certaine… Et, pour nous conformer à la volonté de la Sainte-Vierge, plusieurs fois exprimée lors de l’apparition, nous nous proposons de bâtier un sanctuaire sur le terrain de la grotte ». En 1871, l’église supérieure – « une magnifique église gothique, qui reçoit tous les jours de nouveaux embellissements » - est achevée, mais ne sera consacrée qu’en 1879.
Vitrail de l’église de Flassans
La ferveur des fidèles d’Avignon
En 1862, la Revue des Bibliothèques paroissiales du diocèse d’Avignon n’évoque en rien cette reconnaissance. En revanche, une chronique rappelle le huitième anniversaire de la proclamation du dogme, et le troisième de l’établissement de la statue monumentale sur le clocher de l’archi-basilique métropolitaine de Notre-Dame-des-Doms, et s’émerveille de voir « le mouvement, l’entrain, le zèle, la physionomie en un mot toute radieuse d’élan et de spontanéité de la Seconde Rome » à l’occasion des fêtes de l’Immaculée Conception à Avignon.
Tympan du portail d’entrée de la chapelle de la congrégation des soeurs de l’Immaculée-Conception, rue Paul Saïn, Avignon
Les premiers pèlerins
En août 1872, quelque 150 fidèles se sont joints au pèlerinage de Nîmes pour se rendre à Lourdes. « Les pieux fidèles du diocèse d’Avignon ne pouvaient rester froids et indifférents au milieu de l’entrain, de l’élan qui pousse les populations vers la grotte de Lourdes ». Ils étaient toutefois trop peu nombreux pour former un pèlerinage à part. En octobre 1872, 106 pèlerinages sont annoncés, sans compter le national et « les points les plus reculés de la France envoient un contingent toujours grossissant de pèlerins ».
Insignes des pèlerins d’Avignon
Brassard du directeur de pèlerinage, le chanoine Duranton
L’organisation du premier pèlerinage diocésain d’Avignon
L’abbé Bruyère se félicite « il fallait au diocèse d’Avignon son pèlerinage particulier comme l’ont eu tant d’autres diocèses. Il fallait que la bannière de Notre-Dame-des-Doms brillât, dans le nouveau sanctuaire de Lourdes, à côté des images vénérées de N.-D. des Victoires, de N.-D. de la Garde, de N.-D. de Fourvière, de N.-D. de Liesse, etc… Aussi plus de six cents pèlerins sont sur le point de partir pour aller s’agenouiller dans la grotte de l’apparition. Ils emportent avec eux une magnifique bannière qui, déposée dans l’église de ce lieu vénéré, redira à l’avenir que le diocèse d’Avignon n’est jamais le dernier lorsqu’il s’agit de prouver son dévouement à l’Eglise et sa dévotion à Marie ». Le voyage, du 14 au 17 octobre, se fait en train, et l’archevêque est venu bénir les pèlerins au départ le 14 octobre à 9h30.
le chanoine François Bruyère
Prières et cantiques
Un règlement est donné aux pèlerins afin de « conserver au pèlerinage son caractère exclusivement religieux ». Au cours du voyage, la prière du Rosaire, en particulier, et les chants de cantiques sont encouragés. Un cantique a été composé pour l’occasion :
Allons, Chrétiens, vers ce doux sanctuaire,
Charmant asile, où règne le bonheur,
Allons porter, aux pieds de notre Mère,
Nos chants d’amour, les vœux de notre cœur
Dans nos combats, ô Vierge Immaculée,
D’un œil d’amour regardez vos enfants.
N’êtes-vous pas la fleur de la vallée
Dont la vertu nous rendra triomphants ?
Nous vous offrons, Vierge, cette bannière,
De notre fois symbole triomphal ;
Où resplendit ce dont notre âme est fière :
Rome, Avignon, notre amour filial
Bénédiction de la bannière d’Avignon
Portrait présumé de l’abbé Marrel
La bannière, travail soigné des ateliers Bent d’Avignon, fut bénie par l’Archevêque en visite pastorale à Apt, au cœur de la cathédrale, le 13 octobre, veille du départ, voyant comme un signe « comme si l’aïeule du Christ avait voulu agréer, avait voulu envoyer elle-même le beau présent que vous portez à son auguste fille, à la reine des Anges, à celle qui dans les cieux lui dit : Ma Mère ». Et s’adressant encore à l’abbé Marrel, curé de Saint-Didier, il ajoutait : « parlez-lui de mon cher diocèse d’Avignon, de son clergé, de ses fidèles. Parlez-lui aussi de son premier pasteur. Demandez qu’elle lui accorde de rendre utile à son troupeau les jours qui lui restent à vivre, de porter la houlette au milieu de lui avec honneur, pour son bien, pour sa consolation ».
Séjour à Lourdes
Parti le 14 octobre, le train arrive à Lourdes le 15 à 7h30. Tout se passe en une journée. Dès l’arrivée du train, la procession se met en marche, bannière en tête, pour rejoindre la toute nouvelle église où une messe solennelle est célébrée. « Mais chacun languit de descendre à la grotte de l’apparition ; de s’agenouiller sur cette terre sanctifiée par la présence de la Vierge Immaculée, de contempler la statue de Marie dans la niche même où la Bonne-Mère s’est montrée à l’humble filles des montagnes… chacun veut boire de cette eau qui a produit tant de miracles ». Dans l’après-midi, au cours des vêpres un enseignement et donné, et tous participent, cierge en main, à la procession du soir. De nombreux pèlerins obtiennent de pouvoir passer la nuit en prière dans l’église. Et le retour se prépare dès le lendemain, 16 octobre, après la messe.
Centième anniversaire du pèlerinage
Au centre, S. Exc. Mgr Polge, à sa droite, Mgr Robert, à sa gauche, l’abbé Chave et Mgr Amourier
En 1972, du 20 au 26 août, la direction des Pèlerinages du diocèse d’Avignon célébrait le centième anniversaire du pèlerinage d’Avignon à Lourdes, et conduisait près d’un millier de pèlerins à Lourdes une nouvelle fois. « Ils ont fait provision d’espérance. Tel était en effet le thème choisi pour ce pèlerinage et préparé par une équipe dynamique, animée par Mgr Pierre Amourier Vicaire général : « la Vierge Marie, signe d’espérance assurée pour le peuple de Dieu en pèlerinage sur la terre. »
Abbé Bruno Gerthoux
Archiviste
Nouvelle évangélisation> L’évangelisation en pôle position
Une étape décisive soixante ans après l’ouverture de Vatican II.
La nouvelle constitution de la Curie - Praedicate Evangelium - apparaît comme un vrai
« traitement de choc » comme le titrait La Croix du 21 mars : l’évangélisation, la « prédication de l’Évangile » comme est dénommée cette réforme, devient désormais la priorité institutionnelle et donc pastorale du Vatican, et en cela, de toute l’Église, du pape, des évêques, des clercs - et des laïcs - insiste la réforme.
Nous vivons cette étape 60 ans après l’ouverture de Vatican II qui se voulait avant tout un
concile missionnaire, « pour mieux dire Jésus au monde » expliquait Jean XXIII ; « la Nouvelle Évangélisation est le plus beau fruit du Concile » affirma pour sa part Benoît XVI.
Il est sans doute utile en effet de souligner que cette priorité évangélisatrice s’est
affirmée de manière croissante au plan théologique, pastoral et spirituel. A la suite du Concile, aux côtés des innombrables fruits qu’il a portés, l’Église fit le triste constat de certaines dérives dans son interprétation, comme la remise en cause de la légitimité de l’évangélisation visant à conduire des non-chrétiens à la foi chrétienne et à porter le Salut du Christ à tout homme.
Paul VI décide alors de rappeler et d’actualiser les fondamentaux de l’évangélisation, en
publiant en 1975 l’exhortation « L’Évangélisation dans le monde moderne » : il y rappelle que« l’Église est faite pour évangéliser » et qu’on ne peut parler d’évangélisation sans une annonce explicite de Jésus Sauveur, Maître et Seigneur, de Jésus « LE chemin, LA vérité et LA vie » (Jn 14,6).
Jean-Paul II approfondit cet impératif missionnaire en publiant en 1990 l’exhortation « La
Mission du Rédempteur » ; il y développe les fondements, la nécessité et la mise en pratique de la « nouvelle évangélisation », fil rouge pastoral de son pontificat. Benoît XVI décide pour sa part d’ancrer cette nécessité missionnaire dans l’organisation de l’Église : il instaure en 2010 le « Conseil Pontifical pour la Nouvelle Évangélisation » puis il convoque en 2012 un « Synode pour la Nouvelle Évangélisation » qui fit souffler un vent de pentecôte sur tous les continents.
Avec l’exhortation « La Joie de l’Évangile » en 2013, le pape François offre à l’Église le
texte programmatique de son pontificat, centré sur l’évangélisation, l’annonce et le témoignage du kérygme (1) comme le B.A. BA de tout renouveau pastoral, puis il va publier ces derniers jours cette réforme majeure de la Curie.
Ainsi le mandat que Jésus donne à ses disciples - « Allez ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé » (Mt 28, 19-20) - se traduit désormais au plan institutionnel comme la priorité-phare de l’Église. Elle traduit désormais au plan structurel que toute l’activité de l’Église doit se rapporter à l’évangélisation, que ce soit la doctrine, la liturgie, la pastorale, la sphère de la charité, … ; elle engage désormais l’Église et les successeurs de François pour des décennies.
Cette réforme est un signe fort adressé à toute l’Église, à tous les baptisés, elle fixe le cap universellement… et localement : ce « traitement de choc » doit donc s’appliquer à tous les échelons - paroisses, diocèses, mouvements - invités à s’en emparer et à traduire dans leurs propres réformes, un changement d’organisation, de priorité et d’état d’esprit. En raison de leur ministère, les évêques sont en première ligne pour lancer et conduire ce chantier dans les diocèses ; toutefois, les prêtres, les religieux et bien entendu les laïcs y ont toute leur place, beaucoup en seront tout à la fois les acteurs, les aiguillons et les fers de lance. Même si toute la communauté catholique est concernée et doit s’impliquer, c’est aux forces vives actuelles de l’évangélisation en France de se mettre prioritairement au service de ce vaste chantier : sans exclusive bien sûr, nous pensons à tous ceux qui, dans leur grande diversité, se retrouvent très nombreux depuis des années dans les Congrès Mission annuels pour échanger et relire des expériences, réfléchir et se former à la mission, proposer et découvrir de nouvelles initiatives, …Fin février dernier, le pape lui-même nous (2) partageait son action de grâce devant toute la vitalité, la diversité et la créativité missionnaire des laïcs qu’il observait en France. Les services de la Conférence des Évêques, les diocèses, les mouvements, les diverses institutions ecclésiales pourront s’appuyer sur cette grande vague de fond (et certains le font déjà !) pour mener à bien leur propre réforme structurelle et spirituelle centrée plus que jamais sur l’évangélisation.
Dès à présent, sur le terrain, nous sommes tous invités à quitter l’entre-soi catholique que
dénonce si souvent François, et mettre le cap sur la prédication convaincante du kérygme et le témoignage rayonnant de l’Évangile auprès de ceux qui ne viennent pas ou plus à l’Église.
L’enjeu de ce chantier est donc de mobiliser tous les pratiquants dans l’évangélisation des périphéries de l’Église pour devenir ces ‘disciples-missionnaires’ si chers au pape. Ce chantier va encourager ceux qui y sont déjà engagés, aider ceux qui s’interrogent à franchir le pas, interpeller ceux qui y rechignent ou sont découragés.
Nous y voyons en tout cas l’impulsion d’un grand élan évangélisateur donné à l’Église de
France du XXI° siècle, défi si prometteur pour la santé de notre Église et le service de nos frères.
[1] Annonce à chaque homme du Salut en Jésus-Christ
[2] Avec le Conseil de la Communion Priscille & Aquila
Patrimoine> Rochefort du Gard : une colline inspirée...
Un sanctuaire qui s’enracine dans un passé très lointain, un chemin de croix monumental, des tableaux singuliers...
Passant au pied du sanctuaire de Notre-Dame-de-Grâce à Rochefort-du-Gard, la phrase de Barrès me revint à l’esprit : « Il est des lieux où souffle l’esprit... Il est des lieux qui tirent l’âme de sa léthargie, des lieux enveloppés, baignés de mystère, élus de toute éternité pour être le siège de l’émotion religieuse... » C’est le cas de cette « colline inspirée »… Quand elle a été choisie par les R.P. Maristes en 1869 pour y construire un Chemin de Croix monumental, c’est parce qu’elle ressemblait alors à une de ces collines de Judée, dévolue aux moutons, pelée et grillée par le soleil, comme l’atteste en 1900 la photo de ce pèlerinage avec ses diligences. Si vous disposez d’un oeil bien exercé, vous devinez le Chemin de croix à l’extrême droite :
Depuis, la végétation a repris, mais la colline conserve son allure « bédouine » :
Commencez par le début, c’est-à-dire partez d’en bas, de la monumentale entrée qui commémore « l’agonie » du Christ au jardin des Oliviers :
Les murs latéraux supportent des inscriptions et des blasons gravés. À gauche, blason et inscription du Pape Pie IX alors en exercice, et sur le mur de droite, le blason de l’évêque de Nîmes avec sa dédicace que je vous traduis après la photo :
« Ce petit sanctuaire a été érigé en l’honneur de la très douloureuse agonie de Notre Seigneur Jésus Christ, par la générosité d’Henri Plantier, évêque de Nîmes de douce et immortelle mémoire, à la fête de la Sainte Croix le XVIII des calendes d’octobre 1878 » c’est-à-dire si j’ai bien effectué le calcul romain des jours calendaires, le 14 septembre 1878… Mgr Plantier avait tenu à financer sur ses propres deniers cette Porte monumentale, mais il était décédé lors de l’inauguration du pèlerinage, ce qui explique : la douce et immortelle mémoire... mon latin datant quelque peu, j’ai hésité dans la traduction entre : érigé magnifiquement par Henri, ou érigé avec générosité par Henri... Ces inscriptions et blasons sont d’une très grande qualité d’exécution, dans la lignée des grands siècles classiques et même romains, comme le montre le calcul calendaire de la date sur le modèle antique...
Commence ensuite le Chemin de Croix proprement dit, qui vous mènera comme il se doit en 14 stations au Calvaire du Golgotha, sur un chemin qui serpente à flanc de colline en sept lacets étroits... Comme vous le constatez, ces stations sont inspirées des maisons orientales avec coupole, et arc mauresque :
Ce choix architectural - voulu par l’évêque de Nîmes - nous rappelle que le vrai Chemin de Croix, celui du Christ, s’est déroulé à Jérusalem. La Via dolorosa du calvaire de Jérusalem, cette rue qui part du Prétoire de Pilate et mène au Golgotha, est en quelque sorte reconstituée ici…
N’oublions pas que les Chemins de Croix ont été créés au XIVe siècle par les Franciscains qui étaient devenus « Gardiens des Lieux Saints » - et le sont toujours - et qui souhaitaient permettre à ceux qui ne pouvaient partir en pèlerinage à Jérusalem, d’accomplir quand même chez eux un pèlerinage de cœur et de méditation.
Chaque « station-maison » est décorée à l’intérieur, d’une sculpture en haut-relief polychrome illustrant la scène de la station. Ci-dessous, voici par exemple la XIIIe station : « Jésus est déposé de la Croix », le texte figurant sous ce titre : « Ô Marie, imprimez tellement dans mon âme les douleurs que vous ressentîtes au pied de la Croix, que je n’en perde jamais le salutaire souvenir » :
Cette même station possède aussi une grande statue en ronde bosse sur l’extérieur du mur du fond, sans doute parce que ce mur est situé contre la route et vu depuis elle. C’est saint Pierre lui-même, à taille humaine, qui tient ses deux clés à la main. Pourquoi lui ? Sans doute un rappel au sacrifice de Jésus pour les pêcheurs : cet ardent partisan de Jésus l’a renié trois fois cette nuit-là et fut pourtant notre premier Pape :
Suivez ce « chemin montant, sablonneux, malaisé et de tous les côtés au soleil exposé »... oui, vous verrez comme il est raide ce chemin ! Vieux comme moi, demoiselles à talons hauts (si ça existe encore), bancroches, bébés, jeunes mamans, ne commettez pas la même erreur que moi, choisissez un jour plutôt frais… Jadis, on était plus endurci. Sur ce même sentier, le chanoine J.B. Petitalot, enthousiasmé pouvait s’écrier en 1910 : « On dirait, quand ils sont au pied de ce nouvel Horeb, qu’ils entendent la voix de Dieu leur crier comme à Moïse : « Dépose ta chaussure, car le lieu vers lequel tu marches est saint. » Ils gravissent le mont sacré par ses côtés les plus âpres, en se traînant sur les genoux, ou les pieds nus et plus d’une fois meurtris par des pierres ou des rochers au tranchant impitoyable... »
Atteignant la 14e et dernière station, celle de la mise au tombeau, il vous restera encore à grimper la vingtaine de marches qui vous mènera au Golgotha - le Mont du Crâne - avec l’immense croix de Jésus encadrée des croix des larrons, le bon, à sa droite qui le regarde, et le mauvais à sa gauche qui détourne la tête… et à leurs pieds, Marie et Jean :
Quittez maintenant le Chemin de Croix qui s’est terminé sur la Mise au tombeau, pour gagner le sanctuaire où vous attend le Dieu Ressuscité : un condensé de la foi chrétienne, un catéchisme de pierre. Pour cela, suivez à gauche le chemin le long du mur de soutènement du monastère parmi les iris, les romarins et les oliviers, et vous pourrez enfin vous reposer sur l’esplanade du sanctuaire :
Entrez, pénombre et silence vous plongent dans le déluge des siècles. Le lieu remonte au moins à Charlemagne, mais le bâtiment qui vous accueille est plutôt celui du XVIIe. Depuis ces temps reculés, la Vierge est priée pour des cas douloureux ou remerciée pour des grâces reçues, comme l’attestent de très nombreux ex-voto.
Dès l’entrée, une grande pierre couronnée des trois fleurs de lys, en sautoir l’Ordre de Saint-Michel et celui du Saint-Esprit, témoigne que la reine Anne d’Autriche y a fait ses dévotions en 1666 :
Un peu plus loin, la ville de Nîmes remercie la Vierge de Rochefort de l’avoir préservée du choléra en 1888… Très romantique, ce tableau : sur son petit nuage, la Vierge à l’enfant tend son bras le doigt pointé et impératif pour chasser le choléra. Juste en dessous, les pauvres cholériques défunts vont quitter les flammes purificatrices du Purgatoire pour entrer au Paradis. Ce choléra décharné brandissant sa grande faux qui moissonne les vies plane au-dessus de la ville, son linceul virevoltant joliment dans la brise... et obéissant à la Vierge, il va quitter la cité de Nîmes en atteignant le bord du tableau. Nîmes est très reconnaissable, à droite la Tour Magne, le clocher de la cathédrale, les arènes, les doubles tours de Saint-Baudile :
Ou encore, le 10 septembre 1884, l’Archiconfrérie de Notre-Dame du Suffrage remercie d’avoir protégé la diligence qui transportait les confrères, de la foudre et d’un orage qui firent date dans les annales. Les chevaux s’emballent, les passagers de la diligence lèvent les bras pour implorer la Vierge de Grâce... les éclairs zèbrent le ciel d’encre, la foudre tombe, allume un incendie d’où les pauvres victimes carbonisées s’élancent vers le paradis où les attend la Madone, debout dans une éclaircie resplendissante... Une scène d’action pour un film catastrophe :
Vous voulez en voir beaucoup d’autres ? Un ravissant petit musée vous attend, mais un bon conseil, renseignez-vous sur les jours d’ouverture… réussir à le voir se mérite !
Je m’apprêtais à partir quand je vis une très petite fille - 8, 9 ans, agenouillée toute seule sur les marches de l’autel, les mains jointes, les yeux fermés qui priait en silence... Comme sur une image de ces Bons-Points que l’on donnait de mon temps au catéchisme... Rien que pour ce bref instant d’enfance ma journée valait le coup d’être vécue.
De la beauté plein les yeux, vous vous apprêtez vous aussi à partir.
Comme tout bon pèlerin, et même si vous n’êtes venu qu’en touriste, il vous restera à honorer Notre Dame du Suffrage de la façon qui vous conviendra.