1er mars 2023


Edito de l’évêque> Seigneur, avec toi nous irons au désert.

Le chemin du Carême est celui que nous avons commencé à emprunter depuis le mercredi des cendres, accueillant cette invitation à revenir vers le Seigneur, à nous laisser réconcilier, façonner par la justice même de Dieu.

Nous en avons vécu une première étape ce dimanche avec nos communautés rassemblées, et particulièrement à Avignon, à l’Église du Sacré-Cœur, où j’ai célébré l’appel décisif des catéchumènes à recevoir les sacrements de l’Initiation Chrétienne, le baptême, la confirmation et l’eucharistie, au cours des prochaines fêtes pascales.

Le temps du Carême est avant tout celui des catéchumènes. Ces hommes et ces femmes qui se sont laissés rencontrer par le Seigneur, se sont mis en route, à tâtons, souvent dans l’obscurité, et ont marché, accompagnés par des chrétiens, des prêtres de leur communauté, pour mesurer l’amour que le Seigneur leur porte et l’appel qu’il adresse à leur vie.

Ils étaient quarante à se rassembler, d’âge, de lieux, d’horizons divers, étonnés sans doute eux-mêmes de ne pas être seuls, et recevant ce que Dieu manifeste à l’histoire de chacun comme un écho à leur propre expérience.

C’est un long chemin qui les a conduits à ce jour. Celui de leur vie, de leur histoire, de leurs joies, de leurs souffrances. Chemin traversé par la conscience d’un manque, d’un vide. Des appels les ont rejoints au cœur de moments forts : la naissance d’un enfant, le deuil d’un parent, d’un frère, un accident de la vie. Des rencontres également les ont interpellés, avec des hommes et des femmes dont la manière de vivre ‘en croyant’ leur faisait signe, les appelait.

Durant le temps du catéchuménat, ils ont accueilli la Parole, celle que nous recevons en communauté comme dans le secret de notre prière. Ils ont reçu la promesse d’un Dieu qui met en nous son souffle de vie. Ils ont marché avec des croyants. Ils se sont attachés à accueillir, à reconnaitre, à laisser se déployer en eux ce souffle, à ne pas passer à côté de la vie.

Laissons s’exprimer quelques-uns d’entre eux :

« Je ramène chez moi le Nouveau Testament et découvre la prière du Notre Père. Je l’ai apprise et j’essayais de la réciter souvent dans mon coin. »

« Le Seigneur s’est fait connaître à moi. J’ai su qu’il était là pour moi, que je n’étais plus seul, que j’étais aimé plus que tout au monde. »

« La foi s’est immiscée en moi très lentement… je n’ai fait aucun effort pour aller chercher cette foi qui était et demeure un grand mystère. »

« J’ai découvert dans l’intimité des célébrations dominicales, la présence physique du Christ. »

 

Cela a engagé pour eux un chemin avec d’autres, ils ont été accueillis dans nos communautés et continueront à l’être au cours de ces dimanches à venir où ils célèbreront les scrutins.

« J’ai découvert la vie en paroisse… La réaction de la communauté a été formidable, bienveillante, vivant cela pour elle comme une grâce de Dieu. »

Nous le comprenions mieux alors, en accueillant la parole du jour : « L’homme ne vit pas seulement de pain. » Et pour ne pas se laisser prendre totalement par les préoccupations et les aspirations du quotidien, il peut puiser dans le trésor de la Parole et des sacrements qui nous relient à Celui qui vient nous offrir la Vie, et la Vie en abondance.

Nous percevions ce qui a été heureux et précieux sur le chemin de chacun : la rencontre d’autres, la présence de chrétiens, la Parole. Cela les a mis en route et les a changés… parce que la rencontre en profondeur avec ce Dieu Amour nous change et nous comble.

C’est sur ce chemin qu’ils sont appelés aujourd’hui de manière décisive. Et ce sont eux qui viennent nous interpeller et nous entraîner à poursuivre notre chemin de croyants. A continuer à nous laisser convertir. Ils entraînent les ‘vieux croyants’ que nous sommes et les communautés que nous formons à nous laisser renouveler par l’amour que le Seigneur nous manifeste.

Avec eux, prenons ce chemin du Carême. Il nous sera donné de retrouver l’amour que le Seigneur porte à chacun, l’appel qu’il lui adresse, le don qu’il lui fait dans la passion la mort et la résurrection de son Fils.

En marchant les uns avec les autres, que ce temps nous renouvelle et nous tourne plus en vérité vers le Seigneur et vers nos frères.

Seigneur, avec toi nous irons au désert,
Poussés comme toi par l’Esprit ;
Et nous fêterons notre Pâque au désert :
Nous vivrons le désert avec toi.

+ François Fonlupt
Archevêque d’Avignon

Paroisses en créations > L’écologie intégrale en mode Carême : double punition ?

Nous voici entrés en Carême, et il est encore question d’écologie… Dur programme ? Mais non, car il ne faudrait pas faire le malheureux amalgame, doublement raté, d’un Carême triste et douloureux, et d’une écologie contrainte, imposée. De même que le Carême est une porte d’accès à la Joie de la Résurrection, la mise en pratique de l’écologie intégrale dans notre quotidien est une manière de vivre plus intensément notre Foi, notre Espérance et notre Charité, réunies à Pâques.

Notre Foi,

qui dans le Credo (re)dit que Dieu est Créateur du Ciel et de la Terre. Si le Maître revient avant la nuit, et regarde le travail de ses serviteurs-artisans passés après lui, pourra-t-il dire « serviteur bon et fidèle, entre dans la Joie de ton seigneur » ? (Saint Matthieu chapitre 25). Nous avons un peu (beaucoup) de réajustements à faire, pour être plus attentifs à cette Création :

  • Je connais le nom des espèces qui m’entourent ;
  • Quand je suis dans la nature, je loue le Seigneur pour la beauté de la Création ;
  • Je fais mes menus en avance pour n’acheter que ce dont j’ai besoin, local et de saison, et je ne me laisse pas séduire par les promotions ;
  • Dans les régions sèches, je cultive des plantes qui nécessite peu d’arrosage : lavande, thym, sauge, morelle faux jasmin, bignone, stipe, etc…
Notre Espérance,

qui n’oublie pas que la miséricorde de Dieu peut tout, malgré nos aveuglements, nos lenteurs, nos peurs du changement qui nous éloignent de Dieu, et d’une manière très pratique, qui nous éloignent de Dieu présent dans notre prochain. Nous sommes appelés à être des semeurs de graines, terreau fertile, par nos multiples actions et témoignages :

  • Le matin, je ne regarde pas mon téléphone avant d’être habillé ou d’avoir dit bonjour à quelqu’un ;
  • Je place une image sainte dans mon bureau pour me tourner régulièrement vers l’Essentiel ;
  • J’accorde plus d’importance à ma tenue le dimanche que les autres jours, pour honorer le Seigneur ;
  • Je donne ce que je ne porte plus, afin d’exercer l’œuvre de miséricorde corporelle « vêtir ceux qui sont nus » ;
  • J’assume mes cheveux blancs et ne les teins plus ;
  • Si j’ai un filleul, je veille à lui offrir des cadeaux spirituels ;
Notre Charité,

qui peut commencer par nous-même : laissons-nous aimer par Jésus, au lieu d’aller chercher des substituts compensatoires dans le tourisme de masse, le divertissement abrutissant, les écrans, les commérages et vains bavardages des réseaux sociaux, toute vie par procuration. En réponse à cet amour, pratiquons une Charité ordonnée au Christ et donc aux plus petits d’entre nous :

  • Je veille à garder ma langue de la critique : je change de conversation ou me tais, ou bien je trouve une qualité à la personne critiquée. J’ai des paroles bienveillantes ;
  • Baptisé, j’ai conscience que mon corps est le temple du Saint-Esprit et que je peux glorifier Dieu dans mon corps (cf. 1 Co 6,19)
  • J’utilise mon corps pour exercer les œuvres de miséricorde corporelles : donner à manger aux affamés, donner à boire à ceux qui ont soif, vêtir ceux qui sont nus, accueillir les étrangers, assister les malades, visiter les prisonniers, ensevelir les morts ;
  • Pour vivre de manière à refléter la pauvreté du Christ, je veille à avoir une maison simple, dont le nombre de pièces est adapté au nombre de personnes dans le foyer ;
  • Je veille à ce que mes voisins âgés et seuls ne restent pas isolés pendant les fêtes, je les invite ;

Les deux parcours sont un chemin de randonnée, tirant un peu sur les muscles mais emplissant nos poumons d’air nouveau. Et si nous suivons la sagesse de Dieu qui est folie pour les Hommes, en inversant nos horizons, nous pourrions atteindre le Ciel. Eh quoi, un peu d’ambition !

Marie-Anne Molle

Merci à Adeline et Alexis Voizard, pour leur précieuse mine d’idées dans le carnet d’actions de leur livre Comment sauver la planète à domicile, l’art de vivre selon Laudato Si’.

Portrait> Anthéa, future baptisée de Pâques 2023

Anthéa fait partie des catéchumènes adultes qui vont être baptisés cette année à Pâques, peut-être un peu grâce à ses deux jeunes enfants !

« Je ne suis pas née dans une famille croyante. Mon éducation catholique, je l’ai faite grâce à la Comtesse de Ségur avec Les malheurs de Sophie et Les petites filles modèles : tous les principes chrétiens comme la charité et la repentance, je les ai connus grâce à ces mères très pieuses que sont Mme de Fleurville et Mme de Rosebourg. Il y a dans ces livres toute la tradition chrétienne dans le sens éducatif mais il y a aussi quelque chose de plus profond : comment être chrétien impacte toute la vie. Quand je voyais Mme de Fleurville parler à Sophie, j’avais l’impression qu’elle me parlait à moi ! »

Plus tard, scolarisée au lycée de l’Immaculée Conception à Carpentras (connu maintenant sous le nom de Marie Pila), Anthéa n’y trouve pas assez de quoi étancher sa soif de spirituel. 
Ensuite ce sont les études à Nantes. Ce sont des années heureuses mais aussi difficiles avec une dépression et deux tentatives de suicide.

« A cette époque-là, j’étais toujours croyante mais je ne voyais pas Dieu comme un secours ! Et je me suis toujours dit que si j’en étais là ce n’était pas à cause de Dieu mais par ma faute. »

Vers 20 ans, Anthéa commence à avoir des expériences occultes. « J’ai commencé à percevoir les auras, cela me semblait sympa, puis j’ai pratiqué un peu d’ésotérisme, de manière très libre ; et j’ai compris à ce moment-là que j’étais hypersensible au niveau émotionnel et aussi dans tout ce qui dépasse les cinq sens. »
Anthéa rencontre son futur mari en 2014 ; ils se marient religieusement en 2018, ont deux enfants qu’ils font baptiser, notamment à cause des facultés de perception qui « étaient descendues jusqu’à son fils qui parlait de fantômes avant même l’âge de deux ans ». 
Le baptême devenait donc une priorité et au moment du baptême, la prière de libération pour eux, a eu aussi une action sur Anthéa. C’est ainsi que, par le baptême de ses enfants, Anthéa a été libérée de toutes ses présences autour d’elle. Aujourd’hui elle est toujours une personne hypersensible mais elle y met un filtre, et surtout :

« Je veux que, maintenant, ma sensibilité soit mise au service de Dieu, au service de la foi et au service de tous ceux que je rencontre qui pourraient eux aussi avoir envie de s’engager sur le chemin du Christ.

Et pour mes enfants, je veux surtout que, quoi qu’il arrive, le Christ soit leur lumière, leur chemin, et que même dans les pires moments, ils puissent se dire que Jésus est là ! Nous on les entraîne vers la foi et eux, nous rappellent que cette foi est à vivre concrètement dans le quotidien, et c’est merveilleux ! »

Anthéa a donc entrepris de se préparer au Baptême qu’elle recevra à Pâques en l’église Saint-Ruf d’Avignon.
« Quand on étudie des passages de la Bible, j’en ressors émerveillée avec l’envie d’en savoir plus ; mais aussi on apprend à prier, à aller à la messe. Je me sens bien, apaisée quand je vais à la messe, même s’il faut quelquefois se motiver le dimanche matin : les chants, les bénédictions me font pleurer, mais ça fait du bien ! Dieu me touche, Dieu est là ! Donc, je vais à la messe de plus en plus, et si je rate un dimanche, j’essaie d’y aller en semaine. »
Anthéa attend de plus en plus impatiemment le Baptême.

« Sans le baptême, il me manque quelque chose. J’ai l’impression qu’il y a un rideau devant moi et que par le baptême, je vais pouvoir franchir ce rideau ! »

Résumé d’un entretien avec Martine Racine pour l’émission « Pourquoi le Taire » sur RCF Vaucluse

par Sylvie Testud

 

 

Le livre du mois> La gloire des bons à rien, de Sylvain Detoc

Voilà un livre thérapeutique, propre à nous enlever tous nos complexes de… bons à rien ! Car on apprend que c’est justement ceux que Dieu recrute .

Le premier appelé, Abraham est un vieillard flanqué d’une femme stérile, Moïse un bègue, Pierre un lâche, Matthieu un collabo, Jacques et Jean des ambitieux, Marie-Madeleine une courtisane, Paul un fanatique et bien d’autres recrues qui jalonnent cet ouvrage sont aussi peu glorieuses… Rien en tous cas qui puisse nous impressionner comme idéal indépassable !

Bien au contraire, comme en témoigne le personnage qui illustre la couverture du livre, Zachée, un voleur, à qui pourtant Jésus demande de demeurer chez lui et qui le reçoit aussitôt avec joie, nous dit l’évangile.

Recevoir Jésus avec joie est en fait l’objectif réel de ce livre, qui nous rappelle sans cesse que

c’est Dieu qui nous a aimés le premier, alors que nous n’étions encore capables de rien, comme le dit Saint Paul (Rm 5, 6)

En effet, Dieu ne s’est pas découragé devant notre misère due au péché, car il sait que la pâte humaine qu’il a voulue à l’origine est bonne . Et cette pâte en fusion, Il la reprend inlassablement afin qu’elle atteigne l’éclat qu’Il a toujours voulu lui donner. C’est pourquoi Dieu est plus grand que notre cœur : Il voit, au delà de la chenille, le papillon que nous sommes destinés à devenir.

Cela ne veut pas dire que nous devons attendre passivement une autre vie dans laquelle aurait lieu cette transfiguration. Non, la vie éternelle a déjà commencé ici-bas, et anime tout notre être, y compris notre corps, puisque destiné à la résurrection.

Même si l’harmonie entre corps et âme - ici-bas encore brouillée - ne sera restaurée parfaitement que dans l’au-delà.

Le salut est en effet le fruit d’une longue gestation au cours de laquelle Dieu agit en ce monde, en se servant du mal lui-même pour en faire un plus grand bien.

Déjà nous voyons dans la Bible que même les actes mauvais permis par Dieu peuvent être incorporés à son dessein (exemple de Joseph vendu par ses frères). Le plus grand mal étant évidemment le péché des origines dont Dieu s’est servi pour notre salut. Bienheureuse faute qui nous valut un tel rédempteur…

De même, Dieu se sert de notre misère pour nous faire grandir en sainteté.
Car comme l’écrit un mystique, les plus grands et les plus beaux des arbres - les saints - ne sont pas ceux qui ont le moins péché, mais ceux qui ont su utiliser leur propre misère, les feuilles décomposées et le bois mort de leurs péchés, comme un engrais.

C’est en effet dans l’humus (l’humilité) que le grain tombé en terre doit mourir pour porter du fruit.

Si « Tout est grâce » comme nous le rappelle Sainte Thérèse, cette grâce pour autant n’agit pas comme une baguette magique, elle fait appel à la libre coopération de l’homme, et cette synergie porte le doux nom d’Alliance :

Dieu, qui t’a fait sans toi, ne te sauvera pas sans toi, rappelle Saint Augustin

Après ces considérations, l’auteur nous invite instamment à ne jamais perdre confiance en la bonté infinie de Dieu pour nous, et donc à ne jamais rien céder à l’adversaire qui voudrait nous faire perdre cette confiance, nous décourager en nous renvoyant sans cesse à la figure notre misère de « bon à rien ».

Cependant, il nous met en garde : la vie chrétienne ne consiste pas à gagner des « points ciel » . Le Ciel n’est pas un supermarché où il faudrait présenter sa carte de fidélité à la caisse. Le salut ne s’achète pas : la grâce, c’est gratis.

Car en définitive, comme nous dit Saint Jean de La Croix : « À la fin nous serons jugés sur l’Amour ».

Enseignement catholique > « Le Christ, la lumière sur le chemin » - Démarche Prospective

Le 11 janvier s’est tenue la journée nationale de la prospective de l’Enseignement Catholique en présence de 600 participants, réunis au Palais des Congrès de la Cité des Sciences à Paris. Une délégation diocésaine de l’Enseignement Catholique de Vaucluse a participé à cette journée. M. Fabien Crégut, chargé de mission et référent sécurité à la DDEC, nous livre son témoignage

Mercredi 11 janvier, j’accompagnais une délégation de la direction diocésaine à la journée de prospective de l’enseignement catholique sur Paris, à la demande du Directeur diocésain, Monsieur Olivier de COAT. Une journée d’échanges, de partages, de projets avec des acteurs de l’enseignement catholique. Lors du rassemblement final, avant l’envoi, les six cents participants se sont retrouvés dans le grand amphithéâtre de la cité des sciences. Là, je me suis alors remémoré mon séjour à Barcelone lors de la pause de Noël, en famille. Là, dans l’obscurité de cet amphithéâtre, je me suis replongé dans la lumière de la Sagrada Familia. Et j’ai compris, l’œuvre d’Antoni GAUDI, humble parmi les humbles. En effet, sans lumière, la Sagrada Familia est vide. Sans lumière elle n’est qu’éléments architecturaux, coupés à la hache, neutres et insipides. Mais lorsque la lumière est là, elle traverse les vitraux et diffuse la présence de Dieu dans toute la Sagrada Familia. En lumière, une palette de couleurs vient habiller les murs neutres, écrin alors, de la vision du créateur des lieux pour le Créateur des cieux.

Alors pourquoi avoir repensé à ce séjour lors de cette journée de prospective, tel un élève qui regarde par la fenêtre en classe s’échappant des connaissances qui lui sont partagées ? Cette journée d’échanges, de rencontres et de partages aurait pu n’être qu’un forum de pratiques d’une multinationale à la recherche de la bonne idée, un inventaire à la Prévert pour rester dans le coup et ne pas perdre du terrain. Mais non, la lumière, la vision, dans cette immensité de la cité des sciences, c’était le Christ.

En effet, c’est la présence du Christ qui habite nos établissements. C’est le regard du Christ qui habille nos rencontres. C’est cette présence, ce regard porté sur l’Autre qui l’accueillent avec ses blessures personnelles, ses failles, ses besoins d’accompagnement, ses réussites, ses joies, sur son chemin, à la lumière du Christ.

Alors, j’ai ressenti sa présence, transformant des projets, des partages, des échanges en lumière.

M. Fabien Crégut
Chargé de mission et responsable sécurité à la DDEC Vaucluse

Plus d’information sur cette journée sur : JOURNEE PROSPECTIVE

 

Il y a 100 ans dans le diocèse> Autrefois dans le diocèse d’Avignon - Mars 1873-1973

Le mois de saint Joseph - mars 1873

La chronique de Monsieur le chanoine Bruyère dans la dernière livraison du Bulletin diocésain de mars 1873 est consacrée à la dévotion à saint Joseph, évoquant « notre profonde vénération pour l’époux de la Reine des Vierges ».

« Il n’est aucun sanctuaire, à lui dédié, que de pieuses mains n’aient orné de guirlandes ; pas d’autel si pauvre qui n’ai étincelé de lumières et sur lequel les fleurs printanières n’aient étalé leurs couleurs variées et exhalé leur suave parfum… l’amour et la reconnaissance ont redit avec enthousiasme les grâces obtenues par son entremise ».

Il contemple et médite sur la place de saint Joseph au sein de la Sainte-Famille, glorifiant « sa tendre sollicitude pour le dépôt qui lui a été confié, (…) son empressement à prendre le fils de Dieu dans ses bras et à fuir à travers les montagnes et les vastes déserts la fureur d’Hérode ». « Nul doute, ajoute-t’il, que du haut de son séjour de gloire, saint Joseph ne porte une prédilection particulière à l’enfant chrétien, devenu par la grâce frère de Jésus et héritier du royaume céleste. Il continue la tendresse, la sollicitude, les soins qu’il avait pour Celui dont l’enfant sage est la plus vive et la plus touchante image ».

Décès de Monsieur l’abbé Joseph Esclangon 27 février 1923

Joseph Esclangon est né à l’Isle-sur-la-Sorgue en 1856. A Sainte-Garde, où il fit ses études, il se fit remarquer par ses grandes qualités de piété. Il poursuivit ses études au Grand-Séminaire, où s’affermirent ses fortes études, sa vive piété et sa régularité parfaite. Il fut ordonné prêtre en 1881 et « reçut dans ses mains, saintes et vénérables déjà, le calice que lui léguait son grand-oncle, l’abbé Bertet, ancien curé de Séguret, mort à Gadagne ».

Il fit un bref passage comme vicaire à Pernes, mais des problèmes de santé l’ont contraint au repos, aussi « il prit le chemin de Sainte Garde pour s’y refaire sous la paternelle administration de M. Bernard, dont le nom évoque toujours avec émotion l’image même de la bonté, sans faiblesse ». Il fut dans cette maison, professeur, maître de chœur et économe.

Il fut ensuite curé de Saumane, de Sablet puis de Caderousse, où il se montra toujours « un curé exemplaire ». A Caderousse, à nouveau repris par sa faible santé, il ne fit qu’un bref passage, et rejoignit Carpentras pour être aumônier du Carmel.

« La mort s’avançait lentement mais impitoyablement, terrassant le corps d’abord, puis les facultés de l’âme, et supprimant même à peu près toute conscience. Mais Dieu qui voulut associer son fidèle Ministre au Mystère de la Croix d’une façon toute particulière avait député auprès du malade un ange qui fut son second Ange Gardien. Par sa bonté souriante et son inlassable dévouement, Mlle Gabrielle Esclangon prolongea certainement les jours d’un frère que tant d’épreuves lui rendaient encore plus cher ».

« Que du haut du ciel, le cher abbé veille sur le diocèse et qu’il y suscite les prêtres fait à son image ! »

Décès de Monsieur le chanoine Gustave-Michel Ripert, 13 mars 1923

Né à Lumière le 21 septembre 1855, « tout prêt du sanctuaire où il devait plus tard devenir supérieur des chapelains », il est mort subitement à l’hôpital Saint-Joseph, à Lyon. « Ses confrères, auxquels il ne sut jamais rien refuser de son ministère et de ses forces, les si nombreuses paroisses qu’il évangélisa, les pèlerins de Notre-Dame de Lumière qu’il accueillait toujours si aimablement, déplorent une mort qui fait un si grand vide dans les rangs du clergé diocésain ».

Ordonné prêtre le 7 juin 1879 avec huit autres confrères, il est d’abord nommé vicaire à Cavaillon. En 1884, il entre à Saint-Sulpice, où il ne restera pas, mais enseignera au Petit-Séminaire de Sainte-Garde. En 1886, il est nommé vicaire à Saint-Didier, puis recteur à Lapalud en 1899. En 1904, il est curé de Pernes où il restera jusqu’en 1910, date à laquelle il deviendra supérieur des chapelains de Notre-Dame-de-Lumière. Entre-temps, il est nommé chanoine honoraire du Vénérable Chapitre de Notre-Dame-des-Doms en 1907. En 1917, il est transféré curé-doyen de Bollène jusqu’à son décès le 13 mars 1923.

Il fut inhumé « là-haut sous les pins, à l’ombre du rocher de Saint-Michel, dans la chapelle même consacrée au glorieux archange » à Lumière.

Ministère presbytéral dans le Peuple de Dieu, session sacerdotale à Vénasque, 1-2 mars 1973

Cette session fut préparée pendant dix mois par le Conseil Presbytéral « recueillant les échos du diocèse », précisant les « objectifs et méthode de travail ». Cet évènement était attendu ! Si le bulletin du diocèse du mois de mars 1973 donne de larges extraits des trois conférences qui furent données, mais « l’apport actif des sessionnistes dans les carrefours et au cours de l’assemblée générale » apparaît moins directement, pour autant ces 26 pages – notamment les orientations données par l’archevêque en conclusion - rendent un vibrant témoignage synodal qui a été fait.

Les conférences qui viennent éclairer et nourrir la réflexion des participants, sont données par Mgr Bouchex, consacré évêque le 19 mars 1972, et qui était alors évêque-auxiliaire d’Aix-et-Arles. La première conférence veut situer et identifier les ministères dans la vie actuelle de l’Église. Pour bien les comprendre, l’évêque a d’abord parlé de l’Église et de sa mission : « Que Dieu, le Père de Jésus-Christ, soit glorifié, c’est-à-dire reconnu, nommé, célébré comme Celui qui est la source et aussi le terme du sens que nous cherchons pour notre vie, du sens que les hommes cherchent pour leur vie ». Cette mission est vécue et portée par une diversité légitime de communautés qui vivent et témoignent, demeurant attentives aux besoins et aux attentes de leurs frères. Les ministères sont des services, mais tous les services ne sont pas des ministères, et Mgr Bouchex donne quelques traits qui permettent de discerner les ministères, et il en distingue trois catégories, en lien avec l’Église : les ministères reconnus, institués et ordonnés.

Il s’attarde alors sur les ministères ordonnés dans la variété des ministères et dans les communautés. Si les ministères ordonnés prennent leur place parmi d’autres, il ne s’agit ni de dévaloriser les premiers, ni d’utiliser ou de réduire les seconds, chacun a sa place dans un esprit de communion. Et la première condition est « que nous retrouvions sans cesse à sa source le service irremplaçable que nous avons à vivre », la deuxième est de comprendre la diversité des ministères comme une richesse et un enrichissement.

Il approfondit sa réflexion sur « notre ministère » pour le mieux comprendre et découvrir à nouveau « le service irremplaçable qu’il doit rendre au milieu des autres ministères ». Il insiste sur la compétence nécessaire pour accomplir ce ministère indispensable, parce qu’il s’agit « de maintenir le lien au Jésus de l’Histoire dont les Apôtres sont témoins, et c’est de maintenir le lien au Christ toujours vivant ». Ce ministère appelle de chacun une fidélité personnelle au Christ de qui la mission est reçue par l’Église. Il est difficile de rendre en quelques mots toute la richesse de l’enseignement de Mgr Bouchex sur la beauté et le contenu de la mission des ministres ordonnés.

Il évoque ensuite quelques conditions « à mettre en œuvre à propos de ces ministères et de notre ministère parmi les ministères » : nous sommes tous nécessaires ; apprendre à vivre et à vérifier ce que nous vivons ; apprendre à travailler dans l’unité ; partager nos réussites ; vivre avec un esprit d’initiative, voir ce qui a de la valeur, ce qu’il faut améliorer en lien avec les autres fidèles du Christ.

Les orientations données par Mgr Polge, archevêque d’Avignon, ressortent des réflexions en carrefours : reconnaître et découvrir les chrétiens effectivement engagés ; appeler toujours plus ; aller au plus profond de nos responsabilités. Pour cela « la formation humaine, doctrinale, spirituelle, est essentielle pour ne pas décourager, compromettre l’effort actuel et pour lui donner toute son efficacité évangélique ». Il engage à une démarche synodale qui n’en a pas le nom, à « penser avec » les religieux et les laïcs.

Il conclue « la collaboration des religieuses et des laïcs, loin de mettre en cause notre ministère de prêtres, lui redonnera un sens renouvelé. Loin de rendre inutiles ou moins importantes nos rencontres sacerdotales, elle les suppose et exige plus que jamais. C’est là, qu’entre prêtres, partageant nos réussites comme nos échecs, nous nous aiderons à vérifier la qualité de notre présence, de notre travail avec les autres, les fondements de notre foi, de notre vie, de notre ministère indispensable ».

Abbé Bruno Gerthoux
Archiviste

Patrimoine> Le rêve fracassé du cardinal : du tombeau immortel à l’étagère du musée

Né vers 1325 dans une famille de nobles bourguignons, Jean de la Grange entre chez les Bénédictins, devient un célèbre et brillant docteur en droit et connaît dès lors une rapide et brillante carrière : Abbé de Fécamp puis évêque d’Amiens, il participe aux négociations diplomatiques de traités de paix en Espagne, puis avec les Anglais. Le roi Charles V le nomme Président au Parlement, le prend comme ministre des Finances, puis comme chef de son Conseil. Il est élevé au cardinalat. Il a alors 50 ans et va partir pour Avignon où il va connaître une seconde carrière tout aussi brillante dans cette Histoire si compliquée qui fut celle du Grand Schisme entre Rome et Avignon.

Peu avant sa mort, il conçoit le projet de faire élever un tombeau grandiose dans sa cathédrale d’Amiens dont il continue à s’occuper… Mais, les voyages étant alors longs, fatigants et périlleux, il sait qu’il risque aussi de mourir à Avignon où il habite. Il entreprend donc de s’en faire construire un second dans l’église Saint-Martial d’Avignon qui vient d’être achevée… il décède la même année, il a 77 ans. Dans son testament, il avait précisé que « son cadavre serait mis en pièce, ses os portés secrètement à Amiens … et le surplus demeurera à Saint-Martial, pour y être inhumé dans le sépulcre qu’il y aurait destiné. »

Le tombeau d’Avignon restera jusqu’à la Révolution, où il sera détruit, la visite avignonnaise indispensable pour tout amateur d’Art. Il comportait sept registres empilés : tout en bas, le Transi, c’est-à-dire le cadavre du cardinal en décomposition dont le phylactère en latin nous donne la clé : « Nous sommes un spectacle pour le monde. Que grands et petits, par notre exemple, voient bien à quel état ils seront inexorablement réduits, quel que soit leur condition, leur sexe ou leur âge. Pourquoi donc, misérable, es-tu plein d’orgueil ? Tu es cendres et cendres tu retourneras, cadavre fétide, nourriture et pitance de vermine ». C’est l’illustration de l’avertissement de la Bible : tu es poussière et tu retourneras à la poussière… Ce transi est aujourd’hui au musée du Petit Palais d’Avignon :

Juste au-dessus du transi se trouvait le gisant de Lagrange, en habit de cardinal, avec sa mitre d’évêque, du linge splendidement décoré, des colliers, des bagues. C’est le complément indispensable du transi « poussière » : voilà la position illustre où t’avait placé la vanité humaine ! :

Et ensuite, au-dessus s’élevaient cinq autres registres traitant de la vie de la Vierge Marie entourés des grands personnages que le cardinal avait servis à la Cour du roi et qui ont été identifiés en 1952 par Pierre Pradel comme les visages du roi Charles VI et de son frère Louis d’Orléans... Ici, Charles VI présenté par l’apôtre Saint Jacques :

Ci-dessous, Louis d’Orléans présenté par un ange :

Si le registre du bas - le transi - était bien un « memento mori  » rappelant le spectateur à l’humilité, les six registres supérieurs, ceux que l’on voyait de partout, chantaient certes la gloire de la Vierge, mais aussi et surtout, racontaient le destin magnifique du cardinal Jean de la Grange entouré des rois et des princes qu’il avait fréquentés et servis. De l’humilité ? Oui, mais tout en bas, au ras du sol !

L’Histoire, la grande, la furieuse, mettra quatre siècles à rappeler notre cardinal à la modestie : en 1792, Saint-Martial sera livrée à la tourmente révolutionnaire, le tombeau brisé à la masse, certains débris seront sauvegardés au musée et d’autres exhumés du sol jusque dans les années cinquante. Quant au tombeau d’Amiens, il sera démoli par les chanoines au XVIIIe.

Allez donc au musée du Petit Palais - celui d’Avignon - pour voir sur des présentoirs les restes encore éblouissants de ce tombeau. Si vous disposez d’un peu de temps et si votre humeur vous le permet, profitez de l’exemple sous vos yeux du rêve fracassé de notre magnifique cardinal, pour méditer le verset 19 du chapitre 3 de la Genèse : « Souviens-toi, homme, que tu es poussière et que tu redeviendras poussière. » Et pourquoi vous priver ? Ajoutez-y la sentence amère de l’Ecclesiaste : «  Vanitas, vanitatum et omnia vanitas  ».

François-Marie Legœuil