Les soldes du Black Friday ces derniers jours, ode à la surconsommation, puis bientôt la frénésie de Noël (dans sa version païenne) avec ses achats intempestifs, sont de formidables exercices pour perfectionner notre ajustement aux vertus de mesure, de gratitude et de générosité, en prévision de la (véritable) fête de Noël, celle du don incommensurable que Dieu a fait par la naissance de son Fils bien aimé, en qui Il trouve sa joie.
Vertu de mesure, car la prolifération des biens étouffe notre âme. Une juste mesure met une limite salutaire à l’avidité et permet de laisser plus de place à la charité. Elle rend riche parce qu’elle privilégie l’être au détriment de l’avoir, si superficiel et éphémère ; parce qu’elle nous recentre sur ce qui fait le bonheur de notre âme. Je vous le confirme, ce ne sera pas le calendrier de l’Avent de la boutique de cosmétiques.
« Nous serions assez riches si nous recourions aux besoins comme mesure, et non aux désirs » 1.
Vertu de gratitude, car tout nous vient de Dieu, même ce que nous croyons avoir accompli cette année par nos propres efforts et nos propres talents. En ce début d’Avent, devant l’étable de la crèche qui va accueillir le petit enfant Roi, la gratitude pour les dons que le Seigneur nous fait quotidiennement peut s’exprimer à travers la dîme : la part donnée à Dieu, sur tout ce que nous avons reçu de Lui. Non non, elle n’a pas été portée disparue entre l’Ancien et le Nouveau Testament ! Prélevée avant nos dépenses superflues, nos cadeaux auto-valorisants, nos achats compensatoires, ne craignons pas non plus de la prendre sur notre nécessaire, car Dieu donne en abondance à celui qui Lui obéit et Lui fait confiance : « [En retour] mon Dieu comblera tous vos besoins, selon sa richesse, magnifiquement, dans le Christ Jésus »2.
Vertu de générosité pendant ces fêtes de famille, où la patience, l’accueil, l’écoute, la prévenance, sont mis à rude épreuve (d’où l’invention du chocolat : Dieu est bon). La générosité déborde le simple cadre financier pour s’exercer dans nos rapports avec nos contemporains, que nous les ayons choisis ou pas. Générosité d’une attention portée aux plus petits, mais aussi aux plus casse-pieds, aux plus enquiquinants, comme ces aveugles de Jéricho qui crient sur le passage de Jésus (Mt 20, 30). Serons-nous de ceux qui voulaient les faire taire ?
Ces trois vertus sont embrassées, embrasées par la charité. Elles la magnifient et la fortifient. Par la mesure, je me rends plus disponible pour mes frères ; par la gratitude envers Dieu, je suis plus attentive à ses œuvres et à ses lois ; par la générosité, je me fais plus proche des premiers du Royaume.
Et tout cela, en nous plaçant à la suite du Christ et en réajustant notre manière d’être au monde et aux autres, je crois que c’est aussi de l’écologie intégrale (pour reprendre les gros mots à la mode).
Marie-Anne MOLLE
1. Métastase, courrier du 2 juin 1755, cité par Carlo Ossola dans Les Vertus communes, éd. Les Belles Lettres
2. Ph 4,19 cité par Jean Pliya dans Donner comme un enfant de Roi, éd. F-X de Guibert